samedi 25 mars 2017

Mes lectures de fevrier et mars...


Résumé :
Japon, aux alentours de l'an Mil, Shimae, un village paysan sur les bords de la rivière Kusagawa. Cet humble village a un talent : celui d'abriter le pêcheur Katsuro, virtuose dans l'art d'attraper et de transporter des carpes de grande valeur vers la ville impériale d'Heiankyo, la cité de tous les raffinements, de tous les plaisirs, et surtout la ville où se trouve le bureau des jardins et des étangs. À la mort de katsuro, qui se noie dans la rivière, qui parmi les villageois va pouvoir prendre sa suite ? Poser sur son dos le lourd fardeau des nacelles d'osier où tournoient les carpes boueuses et, en équilibre, marcher jusqu'à l'épuisement, traverser tous les dangers jusqu'à la capitale ? Qui ? Sinon la veuve de Katsuro, la ravissante, l'effarouchée, la délicate Miyuki. Mais sera-t-elle capable d'une tâche pareille ?

Amoureuse du Japon j'ai adoré aimé ce livre , pour son écriture précise et raffinée ,je me suis attachée à Miyuki l’héroïne petite paysanne de 27 ans  veuve qui trace sa  route dans ce japon médiéval étrange ,Un récit dont l'impermanence est le fil conducteur.   A croire que Decoin sensei est né à Heiankyo (Kyoto) et qu'il fut l'un des familiers de cette Miyuki, dont le mari, maître ès carpes, vient de se noyer dans les eaux du Kusagawa. Pour accomplir la dernière mission du pêcheur, Miyuki,   achemine  les poissons à la beauté exceptionnelle jusqu'à la cour afin d'orner les étangs des temples.

Accompagnée par les Kamis esprit de la nature chez les shintoîstes elle rencontre sur son chemin des épreuves , les pluies diluviennes sur des chemins boueux,la rencontre avec des brigands,   des mères maquerelles dans des bordels.Mais Miyuki portée par le souvenir de son mari disparu mènera sa mission jusqu'au bout.Un étrange concours d'odeurs clôturera son chemin dans les volutes de parfums   étranges,dont elle sera une source d'inspiration.
 Avec ce récit aux détails enchanteurs, l'auteur réussit le tour de force de transcender "un monde où la seule certitude était l'impermanence"



Sur les chemins noirs




 

2014. « L’année avait été rude. Je m’étais cassé la gueule d’un toit où je faisais le pitre. J’étais tombé du rebord de la nuit, m’étais écrasé sur la Terre. Il avait suffit de huit mètres pour me briser les côtes, les vertèbres, le crâne. J’étais tombé sur un tas d’os. Je regretterais longtemps cette chute parce que je disposais jusqu’alors d’une machine physique qui m’autorisait à vivre en surchauffe. Pour moi, une noble existence ressemblait aux écrans de contrôle des camions sibériens : tous les voyants d’alerte sont au rouge mais la machine taille sa route. La grande santé ? Elle menait au désastre, j’avais pris cinquante ans en dix mètres. À l’hôpital, tout m’avait souri. Le système de santé français a ceci de merveilleux qu’il ne vous place jamais devant vos responsabilités. On ne m’avait rien reproché, on m’avait sauvé. La médecine de fine pointe, la sollicitude des infirmières, l’amour de mes proches, la lecture de Villon-le-punk, tout cela m’avait soigné. Un arbre par la fenêtre m’avait insufflé sa joie vibrante et quatre mois plus tard j’étais dehors, bancal, le corps en peine, avec le sang d’un autre dans les veines, le crâne enfoncé, le ventre paralysé, les poumons cicatrisés, la colonne cloutée de vis et le visage difforme. La vie allait moins swinguer.
Il fallait à présent me montrer fidèle au serment de mes nuits de pitié. Corseté dans un lit étroit, je m’étais dit à voix presque haute : « si je m’en sors, je traverse la France à pied ». Je m’étais vu sur les chemins de pierre ! Je voulais m’en aller par les chemins cachés, flanqués de haies, par les sous-bois de ronces et les pistes à ornières reliant les villages abandonnés. Il existait encore une géographie de traverse pour peu que l’on lise les cartes, que l’on accepte le détour et force les passages. Loin des routes, il existait une France ombreuse protégée du vacarme, épargnée par l’aménagement qui est la pollution du mystère. Une campagne du silence, du sorbier et de la chouette effraie. Des motifs pour courir la campagne, j’aurais pu en aligner des dizaines. Me seriner par exemple que j’avais passé vingt ans à courir le monde entre Oulan- Bator et Valparaiso et qu’il était absurde de connaître Samarcande alors qu’il y avait l’Indreet- Loire. Mais la vraie raison de cette fuite à travers champs, je la tenais serrée sous la forme d’un papier froissé, au fond de mon sac… »
Avec cette traversée à pied de la France réalisée entre août et novembre 2015, Sylvain Tesson part à la rencontre d’un pays sauvage, bizarre et méconnu. C’est aussi l’occasion d’une reconquête intérieure après le terrible accident qui a failli lui coûter la vie en août 2014. Le voici donc en route, par les petits chemins que plus personne n’emprunte, en route vers ces vastes territoires non connectés, qui ont miraculeusement échappé aux assauts de l’urbanisme et de la technologie, mais qui apparaissent sous sa plume habités par une vie ardente, turbulente et fascinante.
Sylvain Tesson est né en 1972. Aventurier et écrivain, président de la Guilde européenne du Raid, il est l’auteur de nombreux essais et récits de voyage, dont L’axe du loup . Son recueil de nouvelles Une vie à coucher dehors , s’inspirant de ses pérégrinations, reportages et documentaires, a reçu le prix Goncourt de la nouvelle 2009. Dans les forêts de Sibérie a été couronné par le prix Médicis essai 2011 et Berezina par le prix des Hussards 2015.



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