mardi 13 février 2024

Mon dernier roman sort à la mi-mars dans les grandes enseignes Fnac, Decitre, Payot...

Quelques dédicaces sont en préparation, je vous en parlerai en temps voulu.

Vous avez donc la primeur, et un court extrait : cadeau.





Il devint Mazzeru comme son père, parrain de Vanina, peu le savaient, le secret bien gardé se cachait dans les strates de mémoires de certains. Personne n’en parlerait à un étranger, mais bien des confidences s’échangeaient dans les hautes maisons en pierre de granit aux murs épais. La culture du secret se faufilait, de génération en génération et couvait dans les foyers, comme un feu qu’on surveille pour ne pas qu’il s’éteigne, qu’il se propage. Un maillage fin, ténu étroit ne laissant rien passer. Dans de nombreux villages de l’île profonde, celle des vallées étroites, des cimes aux neiges éternelles, vivait un berger ou une bergère des morts, il existait aussi des chasseresses qui provoquaient le combat avec l’animal. Les habitants les craignaient tout en éprouvant une certaine fascination mêlée de peur.

Deux fois l’an, les bergers des morts et les chasseresses se réunissaient, pour se livrer des batailles immémoriales à coups d’asphodèles dans l’entre-monde entre rêves et réalité. Les participants venaient de toute l’île et convergeaient vers ce lieu très ancien, empreint de mystère et souvent d’épouvantes. Les nuits de pleine lune aux solstices d’été et d’hiver les estafilades zébraient les visages, du sang coulait sur les torses. Les femmes aussi vives et fortes savaient se battre, surtout l’une d’elles au visage de madone en colère aux longs cheveux d’ébène fouettant la nuit. L’insaisissable guerrière apparaissait et disparaissait à une vitesse foudroyante. Telle Hécate de la lune sombre, maitresse des poignards, déesse des origines sanglantes. Cette nuit-là Orso fut appelé à livrer bataille, il rencontra cette chasseresse des morts, une combattante sans pitié…

Elle frappait avec hargne, ses yeux lançaient des nuits d’éclairs. Ses dents d’une blancheur éclatante luisaient sous les halos de lune, parfois tachées de sang. Les vainqueurs de la bataille compteraient moins de morts dans leurs fiefs ; jusqu’au prochain rendez-vous. Au loin une femme aux longs cheveux de brume laissant un sillage de myrte, de cade et d’immortelle s’éloignait entre les pins et disparut aussi rapidement.

Extrait de l’île de l’entre-monde : Roselyne Cusset.



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